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11 février 2007

Un hêtre...

Un hêtre isolé se dressait, là-bas, au milieu d'un paysage plat surplombé par un ciel en remous aux tons d'ardoise et de lavande. Il se tenait très droit au coeur de cette double immensité de terre rase et de froide lumière, de cette double nudité, et il portait très haut dans le bleu du silence sa cime globuleuse couleur d'ambre et de rouille. Un hêtre en sobre majesté qui conversait avec le vent, avec le vide, avec sa propre ombre, dans le déclin du jour. Le lieu était banal, et pourtant insolite. Nul relief, un chromatisme pauvre, un ciel démesuré, une ligne d'horizon tirée d'un trait austère, et bsa. Mais il y avait l'arbre, son tronc cendré, comme une entaille dans le bleu sourd du ciel, sa ramure arrondie, comme un défi à tant de nivelage, son feuillage cuivré, comme recélant d'obscures résonances. Il y avait ce hêtre planté en sentinelle dans la tombée du jour, dru comme un corps d'attente et de longue endurance. Il habitait l'espace avec simplicité, avec puissance, tout concentré sur soi, sur son invisible coeur d'arbre, son inaudible chant d'arbre, sa solitude d'arbre. Il habitait le temps avec ténacité, avec patience, tramant sans fin des songes sous son écorce grise, tissant et enlaçant les fils ligneux de sa mémoire séculaire...
 
Eclats de Sel, Sylvie Germain, Gallimard, 1996. 

Commentaires

Je découvre ta note aujourd'hui...
Très beau ce texte...
Je me note les références...
Bon week-end !

Écrit par : kti | 24 février 2007

Oui, magnifique texte kti. Bonsoir à toi !

Écrit par : xavier | 26 février 2007

Les commentaires sont fermés.