15 mai 2009
Décloisonner les savoirs
[...] tout ce qui concerne l'être humain est dispersé. Pas seulement dans la biologie ou les sciences humaines et la philosophie, mais aussi dans la poésie et la littérature, qui sont des sources de connaissance de l'humain mais sont considérées comme des luxes esthétiques et non pas des sources de connaissances. [...] On n'est pas dans une société de la connaissance. On est dans une société des connaissances séparées. Le vrai problème, c'est qu'il faut tout réformer. Mais on ne fait que des réformettes ; le secondaire occulte le principal et l'urgence occulte l'essentiel alors que l'essentiel est devenu urgent. [...] On relègue les savoirs dans les mains de spécialistes et on dépossède tous les autres. Par ailleurs, on est complètement ignorant sur les qualités vitales de la culture générale... Ne croire qu'en des spécialités, c'est ne croire qu'en une vision de l'être humain borné et incapable de se poser des problèmes. C'est du crétinisme. De plus, c'est une illusion car, aujourd'hui, dans certaines entreprises, au lieu de recruter des polytechniciens, on recrute des normaliens. On cherche des gens ayant des aptitudes tous terrains plutôt qu'une aptitude limitée à un seul terrain. Il est démontré que le développement des aptitudes de l'esprit humain à traiter des problèmes généraux leur facilite le traitement des problèmes particuliers.
Edgar Morin (Le Monde 12/05/2009)
01:53 Publié dans Pensées multiples, Science en coin, Temps modernes | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : vive la vie, sciences, sciences humaines, éducation