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16 juin 2006

Marché du médicament

Les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments "souffrent d'un manque de transparence et d'une trop grande dépendance vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique". Tel est le constat dressé par la mission d'information de la commission des affaires sociales du Sénat consacrée aux enjeux sanitaires de la politique du médicament, dont le rapport a été rendu public mercredi 14 juin.

Qu'il s'agisse des agences sanitaires, de la formation des médecins ou des experts chargés d'évaluer les produits, l'industrie pharmaceutique est omniprésente à tous les niveaux. Chargée de délivrer les autorisations de mise sur le marché (AMM), l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) est financée à 80 % (contre moins de 50 % en 1999) par des redevances versées par les laboratoires. Quant au budget de 103 millions d'euros de la toute jeune Haute Autorité de santé (HAS), il est "sans commune mesure avec les moyens dont dispose l'industrie pharmaceutique" et apparaît "insuffisant" au regard des multiples missions dévolues à la HAS, dont l'évaluation du service médical rendu (SMR) des médicaments et l'amélioration des pratiques médicales.

Les sénateurs souhaitent "un renforcement des financements publics", surtout pour permettre le développement des études post-AMM. Ces études, dont la nécessité est reconnue, visent à repérer les éventuels effets indésirables d'un produit pharmaceutique lors de son utilisation "en vie réelle" (et pas seulement sur un échantillon réduit de personnes lors des essais cliniques). Une évaluation d'autant plus importante que, pour l'heure, les laboratoires ne sont pas obligés de fournir des essais comparatifs dans leur dossier de demande d'AMM. "Les critères retenus pour l'évaluation d'un médicament relèvent plutôt d'une appréciation par défaut que d'une évaluation de son apport novateur", estiment les sénateurs.

La mission regrette également que l'industrie pharmaceutique "se soit imposée comme le premier vecteur d'information des professionnels de santé". Pas étonnant, dans ces conditions, que la France soit confrontée à "des problèmes de prescriptions inadaptées et de surconsommation médicamenteuse". Dès leurs études, et tout au long de leur carrière, les médecins évoluent dans un environnement où "l'absence de neutralité" est la règle. Dans les facultés de médecine, la pharmacologie est "le parent pauvre" des enseignements. Par la suite, la formation médicale continue (FMC) - obligatoire depuis 1996 - est financée à 98 % par les laboratoires. Quant aux 24 000 visiteurs médicaux qui vont promouvoir les produits de leur firme dans les cabinets de ville, ils "influencent considérablement les comportements de prescription", relève le rapport. Le Vioxx, indique-t-il, avait mobilisé "plus de mille visiteurs médicaux". De plus, les laboratoires "noyautent" la presse médicale et sont parvenus, en finançant le dictionnaire Vidal, qui trône sur tous les bureaux médicaux, à "monopoliser" l'aide à la prescription.

Afin de réduire l'influence de l'industrie, la mission sénatoriale appelle de ses voeux le "développement d'un réseau de délégués de l'assurance-maladie" qui diffuserait "les recommandations des agences sanitaires" et favoriserait l'émergence de "logiciels de prescription indépendants". Soulignant enfin le problème des "conflits d'intérêt" des experts externes auxquels les agences sanitaires font appel pour examiner les dossiers d'AMM, le rapport recommande l'élaboration d'une "charte" ou d'un "statut" de l'expert.

Le Monde, 14 juin 2006. 

Commentaires

Il est temps qu'on se rende compte de la main-mise des laboratoires sur la médecine ...maintenant, qu'est-ce qui va changer ?? ? Je suis sceptique !

Écrit par : MarianneKipleur | 16 juin 2006

Il y a actuellement un véritable problème dont il sera effectivement difficile de sortir. La médecine est dominée par les médicaments. Elle s'éloigne de ses fonctions premières et redevenues encore plus indispensables : santé, soulagement, accompagnement, prévention,... Le plus inquiétant est que cette médecine française, qui reposait sur un système public de prise en charge, est maintenant sous la dépendance paradoxale des grandes firmes privées. Et cela n'est pas beaucoup su et dit. Certes, trouver de nouveaux moyens diagnostiques et thérapeutiques est important, et il ne faut pas refuser le progrès. Mais ne limitons pas la médecine et le progrès aux seuls intérêts des industriels des médicaments.

Écrit par : xavier | 17 juin 2006

Comment pouvez-vous dire que notre système est sous la dépendance des grandes firmes privées ?
Nous avons la meilleure sécu du monde. La preuve ? Elle est in-finançable !
Si les laboratoire étaient les diables tout puissants que vous dites peut-être se seraient-ils débrouillés pour empêcher la rafale de dé-remboursement de ces dernières années...

Écrit par : politic_delux | 18 juin 2006

Oui, obligatoirement, notre médecine est sous dépendance, et c'est, à la fois le signe du progrès, puisque de plus en plus de moyens diagnostiques et thérapeutiques (couteux) sont mis à la disposition de tout un chacun, mais aussi ce qui fait que la meilleure sécu du monde soit devenue "infinançable". Les laboratoires ne sont pas des diables, ils font tout simplement ce qui est normal qu'ils fassent : développer de nouvelles molécules qu'ils puissent vendre. Et effectivement, ils faut qu'ils se défendent, dans la jungle de notre système. Quant au déremboursement, il touche certains types de médicaments, et pas tous. Ce n'est pas si simple, et d'ailleurs, une solution interessante serait d'envisager la participation effective des laboratoires et firmes à l'avancée des problèmes de santé publique.

Écrit par : xavier | 19 juin 2006

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